La fête du sport

Jamais je ne me suis sentie autant en décalage avec mon pays d’accueil.

Il est 10 heures du matin, je patauge dans la gadoue en escarpins, et je suis censée m’enthousiasmer devant des mioches de 4 ans en train de faire « du saut en longueur ». Dans la boue.

Bienvenue au Sports Day.

Tout a commencé il y a quelques jours. Mes capacités d’anticipation étant proches de zéro (au bout de dix ans à Londres, je suis encore du genre à sortir sans parapluie), je n’avais prêté qu’une distraite attention (comprendre : aucune) à la ligne « juin : fête du sport, date à confirmer » dans le calendrier scolaire de MiniPrincesse, pourtant fièrement affiché sur le réfrigérateur familial. Il y a quelques jours donc, papotant avec une autre maman française lors de la récupération des enfants, j’ai donc appris avec stupeur que la présence des parents à la fête du sport (« Sports Day ») était O-BLI-GA-TOIRE. Pas obligatoire au sens « vous encourez amende et peine de prison en cas d’absence » (ces sanctions s’appliquant en cas d’absence des enfants hors vacances scolaires, mais c’est une autre histoire). Non, obligatoire au sens de « vous serez éternellement marqués du sceau du mauvais parent si vous n’assistez pas à cette grand-messe sportive qu’est la fête du sport de l’école anglaise ».

Et n’oublie pas de dire à ton mari de poser sa journée, complète Valérie, narquoise.

  Les pères viennent aussi ?!

Il est de notoriété publique que les pères, EUX, ont mieux à faire que de s’occuper de leurs mômes en semaine et ne s’absentent de leur travail qu’en cas d’événement majeur. La dernière fois que j’ai vu un père, d’ailleurs, c’était au concours d’entrée des enfants de trois ans.

  Hors de question que je me tape des courses en sac et des gamins en train de pleurer sous la pluie, décrète Prince, inébranlable. Mais libre à toi de te dévouer, ajoute-t-il, goguenard.

Vision prophétique s’il en est.

Le jour J

7h30 : je pars au bureau sous une pluie battante. C’est sûr, avec ce temps, ils vont annuler.

8h30 : aucune nouvelle de l’école.

8h45 : toujours aucun mail de l’école. C’est mauvais signe. La pluie, en revanche, est plus forte que jamais. Je pense au léger imperméable noir que j’ai fourré dans la sacoche de MiniPrincesse ce matin, en songeant qu’il ne fera pas le poids devant le déluge qui s’abat sur Londres.

9h30 : aucune envie de quitter mon bureau.

9h40 : si je ne pars dans deux minutes, je vais être en retard.

9h50 : je suis en retard.

10h10 : j’ai fini par localiser le stade local dans lequel, cela va sans dire, je n’avais bien évidemment jamais mis les pieds. Au loin, j’aperçois de nombreux êtres de petite taille, tous en imperméable noir. Vive l’uniforme anglais.  

10h13 : j’arrive juste à temps pour voir MiniPrincesse effectuer un saut en longueur triomphal dans la boue. Et juste à temps pour lui dire de remettre sa capuche.

10h15 : il y a des pères, c’est officiel. Un rapide calcul m’indique cependant que tous les parents de l’école ne sont pas présents, loin de là. Je me garderai bien sûr d’en informer Prince ce soir.

10h18 : « Remets ta capuche, MiniPrincesse » (troisième fois)

10h25 : l’emballement unanime devant un mystérieux relais àen cerceau me laisse perplexe. Je cherche la maman française.

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Au moins, elle a sa capuche

 

10h35 : Valérie m’adresse un clin d’œil complice devant les « You’re the best ! » et autres « Come on, you can do better than that (allez, tu peux faire mieux que ça ! ») du couple (oui, les deux sont là) à côté de nous.

10h50 : « Remets ta capuche, MiniPrincesse » (dix-huitième fois)

11h : pause pipi. J’observe avec une admiration non dissimulée la maîtresse de MiniPrincesse emmener aux toilettes une trentaine d’enfants trempés jusqu’aux os (mais MiniPrincesse a encore sur le crâne quelques cheveux secs).

11h10 : la pluie est plus forte que jamais. Je pars à la recherche de la directrice pour voir s’il y a moyen de négocier de ramener MiniPrincesse à la maison à midi, comme semblent l’indiquer certaines rumeurs (principalement diffusées par les parents étrangers).

11h12 : je me vois opposer une fin de non-recevoir par la directrice. Je crois qu’elle n’a même pas compris pourquoi la question se posait.

11h45 : succession de courses autour du stade, par groupes de quatre. Les pères se voient offrir le beau rôle, à savoir la distribution de médailles. MiniPrincesse arrive systématiquement quatrième. Je n’en verse pas moins une petite larme (ou peut-être est-ce le vent qui me fait pleurer) en la voyant courir à toutes (petites) jambes.

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11h50 : je repense au bon vieux temps où c’était moi qui enchaînais péniblement les tours de stade. Sans une opportune dispense médicale, je crois bien que le sport m’aurait coûté ma mention très bien au bac.

12h05 : le papa d’un petit camarade de classe de MiniPrincesse me demande si elle fait partie de l’équipe des rouges ou de l’équipe des verts. Je ne savais pas qu’il y avait des équipes.

12h30 : fin des festivités pour la matinée. Les gamins qui ne se sont pas goinfrés de chips et de beignets (en libre-service toute la matinée) déballent avec entrain leur pique-nique. Les parents profitent d’une légère accalmie (traduire : le déluge s’est transformé en crachin) pour sortir la sempiternelle couverture de pique-nique et le panier qui va avec. Je rejoins MiniPrincesse pour un agréable casse-croûte champêtre.

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Vision bucolique

 

12h50 : je vois avec inquiétude un groupe de mamans se rapprocher de moi pour savoir si je participerai à la course en sacs des mamans (suivie, bien sûr, de la course des papas, de celle des grands-parents et de celle des tout-petits)

12h52 : une urgence au bureau. Je fais des adieux précipités à MiniPrincesse et traîne pour la dernière fois mes escarpins dans la gadoue.

Il paraît que c’est l’équipe des jaunes qui a gagné.

Je ne savais même pas qu’il y avait une équipe des jaunes.

Le doux pays de mon enfance

J’ai longtemps cru Londres semblable à Paris. Lorsque nous avions des amis de passage, je grommelais volontiers, d’un ton désinvolte : « On n’est pas trop dépaysés, quand même ».

Etonnamment, c’est au bout d’une décennie (ou presque) d’expatriation que le sentiment d’étrangeté se fait de plus en plus nettement sentir.
Surtout lors de mes retours à Paris.

A ma descente de l’Eurostar, que je connais désormais comme ma poche (éviter la voiture 16, toujours pleine, lui préférer la 17, voire la 18, soi-disant réservée aux familles mais en réalité souvent vide), me frappent une multitude de détails, comme un tableau impressionniste dont je ne saurais dire s’il est beau ou laid.

Il fait froid. Pas le froid londonien un peu mou, l’éternel 11 degrés automne comme hiver, non, un vrai froid, celui qui nécessite des gants, un bonnet, voire une cagoule pour les enfants, accessoire inconnu des petits Britanniques.

Cagoule

Hein que ça a l’air confortable !

Ou alors, il fait chaud. Vraiment chaud. Pas la chaleur londonienne un peu hésitante, l’éternel 17 degrés printemps comme été, non, une vraie chaleur, qui nécessite une petite jupe, des sandales ouvertes, voire une robe d’été, vêtement bien connu des petites Britanniques, qui en portent sans paraître souffrir des 17 degrés.

Un père accueille son fils d’une affectueuse bourrade et d’un tonitruant « How are you, fiston ? ». J’ai mal à mon pays dont les enfants – moi la première – quittent le navire à la recherche d’un boulot, d’une ville plus dynamique – combien de fois ai-je entendu « Bien sûr, j’adore la France, mais je ne me vois pas du tout rentrer », d’un ailleurs anglo-saxon ô combien accessible et tellement branché.

J’évite les taxis (chat échaudé craint l’eau froid) et me dirige vers le métro, avec l’impression de sillonner entre les mendiants et les SDF. Les gens se bousculent sans dire pardon. Je rentre enfin dans le métro – sale, malodorant et bondé – et un jeune homme blond, plutôt mignon, bien sous tous rapports, me regarde. Je suis si déshabituée de ces regards que je me demande si mon sac / mon chemisier / mon pantalon est ouvert. Non. Pour une raison qui m’échappe, il cède la place à un autre jeune homme au look très « banlieue ». Amateurs de clichés, vous allez être servis. A peine assis, l’intéressé dégaine son téléphone et marmonne « Ouais, frère, j’ai pas répondu au téléphone, j’étais en garde à vue. Ouais, depuis jeudi, la police elle m’a arrêté. Pourquoi ? Ben, parce que j’ai frappé un mec ».

(sic)

Tout en faisant semblant de ne rien entendre, je m’éloigne un peu – réflexe de survie ? – me rapprochant imperceptiblement du jeune homme qui doit être en train de se féliciter d’avoir proposé sa place à notre voyou de voisin.

Arrêt suivant. Les portes s’ouvrent, et un homme crache dans l’intervalle entre la rame et le quai, comme s’il n’y avait rien de plus naturel. Mon dégoût ne semble rencontrer que l’indifférence du reste du wagon.
Et puis.

Sur le quai, j’aperçois des affiches pour des pièces de théatre ultra-pointues, des expositions, du vaudeville. Des films avec des stars dont je connais encore les noms, et d’autres qui ne m’évoquent rien, puisqu’elles ont dû accéder à la célébrité au cours des dix dernières années. Des publicités pour Décathlon, Picard et Monoprix.

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Je sors du métro et arpente les rues, dévorant du regard bistrots pleins malgré la peur des attentats, les pharmacies où l’on peut se gorger de médicaments qui n’existent même pas en Angleterre, les petites boutiques indépendantes.

Je me noie dans les beaux yeux du boulanger passionné qui me présente avec fougue « son » pain aux noix, « son » pain au kamut et « sa » brioche aux pralines. Je finis par tout lui acheter, et il m’offre un pain au cacao cru et baies roses pour me remercier.

Les gens ont l’air français. C’est peut-être les chaussures bateau, les petits foulards au cou des femmes, une certaine suffisance, que sais-je.
Je suis chez moi.

A la naissance, c’est déjà trop tard (ou le souvenir de l’inscription de MiniPrincesse à l’école anglaise)

9h35 du matin, un lundi. Il pleut. Votre nourrisson s’époumonne. Prise d’une soudaine inspiration, vous appelez, pleine d’espoir, THE école. L’école de quartier ? Que nenni, ma bonne dame ! L’école de quartier, c’est pour les pauvres, les catholiques, et les étrangers (voire les trois à la fois).

THE école, l’école sur laquelle vous avez jeté votre dévolu, n’est donc – sauf rare exception – pas l’école de quartier. Il s’agit d’une école dont on vous a dit le plus grand bien, un peu loin / chère / snob (voire les trois à la fois), mais teeeeeeeeellement réputée. Celle qui amènera votre progéniture à Oxford, Polytechnique ou Harvard (voire les trois à la fois).

Votre bébé crie de plus belle, vous tirant de vos rêves de grande réussite par procuration. Enfin, quelqu’un décroche.

– Allô ? (voix de cerbère mal embouché)

– Bonjour Madame, je vous appelle pour une place pour ma fille.

Le cerbère pouffe théâtralement :

– Quel âge a votre fille ?

– Sept mois, Madame.

(Eclat de rire méprisant) : – Sept mois ? Ah, je suis vraiment confuse (tu parles), mais nous sommes déjà complets pour une entrée en 2019. Nous conseillons vivement aux parents d’inscrire leurs enfants dès la naissance. J’imagine que cela ne vous a pas été possible ? ajoute-t-elle d’une voix doucereuse.

(Prise de conscience paniquée) : – Ah ? Mais… elle n’a que sept mois ? Comment donc puis-je m’y prendre trop tard ?

La responsable des inscriptions, narquoise :

– C’est que notre école est trèèèès prisée, Madame. En plus, votre fille étant née en juillet, ce n’est vraiment pas de chance, elle passe d’office après tous les enfants nés entre septembre et juin. Par ailleurs, nous avons reçu énormément de dossiers de frères et sœurs cette année, or les fratries ont systématiquement priorité, sauf cas exceptionnel bien sûr, vous n’êtes pas sans le savoir.

Vous êtes clairement sans le savoir. Vous raccrochez, abattue, après que le cerbère vous a asséné le coup de grâce :

– Si vous le souhaitez, Madame, nous vous invitons à remplir un dossier d’inscription (et à régler les 100 livres de frais) pour être placée sur liste d’attente ?

Tu parles d’un baptême du feu. Bienvenue dans le système éducatif britannique !

L’heure du choix (ou les premiers pas en école anglaise)

Trois ans d’insomnies passées à imaginer le pire : que MiniPrincesse n’ait pas de place au Lycée Francais de Londres.

Trois ans passés à échafauder les stratagèmes les plus abracadabrants : déménager à l’autre bout de Londres, devenir bibliothécaire au Lycee Francais afin que MiniPrincesse ait priorité en tant que fille d’employée, voire rentrer en France quelques semaines afin de plaider la continuité de l’enseignement.

– Sinon, si tu tiens tant à l enseignement en francais, je connais un endroit où on a des places en école francaise sans problème : la France, lance mon père, l’air de ne pas y toucher.

Malheureusement, Prince demeurant imperturbablement allergique « aux grèves, au Minitel et aux Parisiens qui te bousculent dans le métro » (sic), le retour à ma mère patrie n’est pas (encore ?) d’actualité.
Bref.

Trois ans passés à me triturer les méninges et à me torturer le coeur, et au final… nous avons eu une place au Lycée Francais.
Un été passé à nous triturer les méninges et à nous torturer le coeur, et au final… nous l’avons refusée.

MiniPrincesse fréquente désormais l’école anglaise.

Je ne m’étendrai sur les raisons de notre choix. Chaque situation étant éminemment personnelle, je ne prétends d’ailleurs pas avoir effectué LE bon choix. Simplement le choix qui nous semblait le plus juste (pour MiniPrincesse, plutôt que pour moi).

MiniPrincesse, donc, a fait ses premiers pas en école britannique. Elle a tout d’abord été enchantée à l’idee de comprendre enfin ce qui se tramait autour d’elle ; pour preuve, s’il en fallait, nous l’avons même entendu marmonner dans sa barbe « C’est bien, ils ont choisi l’école anglaise ». Du haut de ses quatre ans, elle n’avait pas perdu une miette de nos tergiversations.

Le bilan, à l’approche des vacances de la Toussaint, pardon, du half-term ?

A part les crises d’hystérie pour ne pas aller à l’école le matin parce que « c’est trop z’embêtant », les réveils en larmes à deux heures du matin parce que « il y a des monstres et c’est pas juste, QUAND MEME » et les tabassages enthousiastes avec son frère « parce que », la rentrée de MiniPrincesse se déroule pour le mieux.

Bastonnade en uniforme

Bastonnade en uniforme (sous couvert de jouer au docteur)

Je ne manquerai pas de vous tenir au courant de l’évolution de la situation.

Impertinente chronique d’une expatriée en vacances

Gloups.

Croyez-le ou non, chers lecteurs, cela fera cette année neuf ans que j’ai quitté la France (NEUF ans ! « Oh là là ! » comme se plaisent à dire les Anglais chics)
Je fais partie de ces expatriés qui s’obstinent à dire qu’ils « rentrent » en France pour les vacances (plutôt que d’y « aller », indice d’une parfaite intégration) et à se défendent ardemment de toute anglophilie. Partis, mais pas complètement quand même.

Comme moi. Indécrottable chauvine j’étais, indécrottable chauvine je resterai.

Et pourtant.

A chaque séjour en France, j’ai un peu plus de mal à retrouver mes marques. Je suis bien « chez moi », et pourtant, c’est comme si la maison avait été un peu dérangée, et les meubles déplacés, en mon absence.  Comme si les choses ne correspondaient plus à l’idée que je m’en faisais. Une sensation qui me laisse troublée, contrariée et désolée à la fois.

Tout simplement suis-je sans doute partie depuis trop longtemps. Il y a des signes qui ne trompent pas. En effet, en vacances, l’expatrié parti-mais-pas-complètement-quand-même…

1.    Ronchonne de trouver les commerces fermés à 20h et le dimanche… mais s’extasie de pouvoir encore s’approvisionner auprès du boucher, du poissonnier et du maraîcher

2.    S’attable avec plaisir à la crêperie la plus populaire du coin… pour se faire accueillir d’un sec et sans appel «va falloir déplacer votre poussette Madame, et j’vous préviens, y’a 20 minutes d’attente, on a trop de monde ». Qu’à cela ne tienne, il quitte les lieux, histoire de faire de la place

Glace a la fraise pour enfants

On se console comme on peut

3.    Se réjouit de voir sa progéniture retrouver un français correct, voire idiomatique… avant de remarquer l’apparition rapide et non moins pernicieuse d’expressions telles que « ça va être compliqué », « bon courage » et autres « le problème, c’est que… ». De son côté, habitué à la familiarité anglo-saxonne, il réserve un bon bistrot au nom de « Patrick » (son prénom) pour s’y faire accueillir d’un sonore « Bonsoir, Monsieur Patrick ! »

4.    S’extasie devant les appétissants produits sur les étals du marché… avant de se faire admonester par le vendeur qui « ne prend pas la carte bleue Madame, mais il y a un distributeur à 10 minutes à pied en sortant du marché si vous voulez »

5.    S’indigne devant les chaotiques pseudo-queues qui poussent au vice, ou tout au moins à doubler furtivement ses voisins… et les imite illico sans vergogne

6.    Va quand même au supermarché pour se ravitailler en pinard, beurre demi-sel et autres saucissons, avant de se faire morigéner à la caisse car il a oublié de peser les fruits et légumes (finalement, c’est quand même plus simple de les acheter au supermarché, d’ailleurs le maraîcher était fermé entre midi et deux). Il tente de faire amende honorable en expliquant à la caissière et aux gens qui s’impatientent derrière lui que là où il habite, la pesée s’effectue en caisse. Avant de se raviser, sous les regards courroucés, et d’abandonner là ses fruits et légumes. De toute manière, avec tout ça, le maraîcher va bientôt rouvrir.

7.    S’agace à son tour lorsque « l’hôtesse de caisse » (apparemment c’est comme ça que ça se dit maintenant, il a eu tout le loisir d’examiner le badge) lui indique que « non, Monsieur, l’enseigne ne distribue plus de sacs plastiques depuis plusieurs années maintenant ». Il règle et s’éloigne en maugréant, les bras chargés de vin, de beurre et de saucisson.

8.    Optimiste comme un Anglais, il se félicite de n’avoir fait tomber que le saucisson, et pas la bouteille de pinard.

9.    Tout d’abord décontenancé de voir sa famille / ses amis passer l’essentiel de la journée à préparer les repas, et l’essentiel des repas à évoquer avec délices ce qu’on pourrait cuisiner au repas suivant, il prend vite le pli et enjoint à sa mère de lui mitonner le bœuf bourguignon / la blanquette de veau / le pot-au-feu de son enfance. Il fait 34 degrés à l’ombre ? Aucune importance, les souvenirs n’attendent pas.

10.    Béat d’admiration devant les majestueux paysages de montagne / splendides côtes bretonnes / paisibles clairières où s’ébattent ses enfants, il se prend à rêver du retour en France… avant que la réalité – sa maison, son travail qui l’attend, ses amis comme lui expatrié-partis-mais-pas-complètement qu’il a d’ailleurs retrouvés pour un dîner à l’île de Ré – ne se rappelle à lui. Le retour en France, ce sera pour un peu plus tard…

Vacances au soleil...

Comment rentrer dans la meilleure école primaire de Londres (?) – épilogue

Si j’avais encore des doutes, la présence de, non pas un, mais PLUSIEURS pères dans la salle d’attente me confirme que THE entretien est bien un évènement crucial dans la courte vie de notre progéniture.

Un rapide coup d’œil aux mères, et je me sens à peu près autant à ma place qu’un éléphant dans un magasin de porcelaine.

Je n’ai pas de manucure.

Pas de manteau hors de prix.

Pas de Ugg.

– Maman, pourquoi tous les enfants ont les cheveux jaunes ? m’interroge bien fort MiniPrincesse, me tirant de ma rêverie. Heureusement que – presque – personne autour de nous n’a l’air de parler français.

Et force est de constater qu’elle a raison. Nous sommes cernées par une armée de blondinets bon teint. Il va falloir jouer serré.

– Ma fille ne se sent pas très bien, confié-je à l’enseignante qui vient chercher MiniPrincesse pour THE entretien, quémandant un peu d’indulgence pour ma pauvre petite fille même pas blonde.

– Pas de problème, ne vous inquiétez pas, me rétorque-elle du tac au tac, tout sourire, son regard me traduisant clairement « Si on n’en veut pas, de ta fille, on n’en veut pas, pas la peine d’essayer de lui trouver des excuses ».

– Ah, et elle ne parle pas très bien anglais… y a-t-il quelqu’un qui parle français, par hasard ?

Pro jusqu’au bout des ongles, l’enseignante répond simplement :

– Je suis sûre que ça va bien se passer, ne vous inquiétez pas (traduire : (« Y a pas marqué Lycée Français, ici »)

Ah, l’art britannique de la conversation.

Elle se penche vers MiniPrincesse, et lui demande en anglais :

– How old are you, MiniPrincess ?

MiniPrincesse, en confiance :

– Yes.

C’est pas gagné, cette affaire. L’angoisse m’étreint lorsque je vois disparaître MiniPrincesse au milieu de la ribambelle de blondinets.

Quarante-cinq pénibles et longues minutes de small talk plus tard (« Moi, je me suis arrêtée de travailler pour me consacrer entièrement à ma fille, c’est teeeeeeellement épanouissant », etc.), MiniPrincesse réapparaît.

– Ma chérie ! Alors, tu as bien joué ? Qu’est-ce que tu as fait ?

Elle, fiérote :

– J’ai fait pipi !

– Ah. Mais encore ?

– Euh… je me suis lavé les mains !

– D’accord. Et quoi d’autre ?

– Euh… rien.

Merveilleux. Ça valait le coup de payer les 50 livres de frais d’inscription.

Un peu plus tard, dans la voiture :

– Maman, tu sais, il y a une dame qui m’a montré quelque chose à l’école de grands.

Moi, toute ouïe :

– Oui, ma chérie ? Qu’est-ce que c’était ?

– Des dinosaures.

Moi, la mort dans l’âme, mais comme si de rien n’était :

– Ah ? Et tu connaissais leurs noms ?

– Ben non, Maman, pourquoi ?

Il n’y a plus qu’à espérer que le Lycée Français fasse une petite place à MiniPrincesse.

Le Graal de l'education en Angleterre ?

Comment occuper un enfant malade de trois ans (astuce : iPad inside)

– Maman, c’est quoi ce gros ventre ?

J’adore passer du temps de qualité avec ma fille.

Ecoute active. Discipline positive. Inspirer, expirer. C’est comme quand MiniPrincesse me balance « Non, Maman, toi dormir sur canapé. Moi dormir avec Papa » : elle ne pense pas à mal. Paraît-il.

Si si, c'est super

Si si, c’est super

– Ben, tu vois ma chérie, après avoir eu un bébé, il faut des années un peu de temps à la maman pour retrouver la ligne.

MiniPrincesse, du haut de ses bientôt trois ans, esquisse une moue dubitative.

– Moi, petit ventre.

Soit. On en reparle dans dix ans.

MiniPrincesse entame son troisième jour à 39,5° de fièvre. La crèche n’en veut pas, la babysitter a déjà succombé aux assauts de ce sale virus, et le médecin anglais (un généraliste bien évidemment, je vous rappelle que les pédiatres n’ont pas droit de cité en Angleterre) vient de nous renvoyer chez nous avec pour toute ordonnance une bonne vieille cup of tea.

Rien, donc, que de très habituel au royaume de sa Majesté.

Dieu que la journée promet d’être longue.

10h35

De retour à la maison.

– MiniPrincesse, tu veux jouer aux Lego ?

– Aime pas Lego.

L’affaire se présente bien.

– Euh… dessiner ?

– Pas dessiner.

– … faire des muffins ?

– Toi faire muffins. Moi manger muffins.

Bon. Faut pas pousser mémé dans les orties, non plus. Soupir de renoncement à toute activité un tant soit peu pédagogique. Comme dit l’autre : « Avant, j’avais des principes. Maintenant, j’ai des enfants ».

– Tu veux jouer à la tablette ?

Je vous jure que si MiniPrincesse était un lapin, ses oreilles se dresseraient bien droites. J’ai juste le temps de voir une tornade de 95 cm de hauteur débouler puis s’asseoir confortablement et SA-GE-MENT sur le canapé avant que ne résonne un sonore :

– TABLEEEEEEEEEEEEETTTE MAMAAAAAAAAAN !!!

– Qu’est-ce qu’on dit ?

– TABLEEEEEEEEEEEEETTTE MAMAAAAAAAAAN S’IL TE PLAIT !!!

Ah. Quand même. Non, parce qu’on est polis, chez nous (même quand on vocifère).

Ce merveilleux interlude devrait me permettre de piquer un somme de lancer une lessive / étendre la lessive / vider le lave-vaisselle / préparer un repas sain et bio à ma fille (ou des pâtes).

11h15

De ma plus douce voix de mère dévouée :

– Ma chérie, viens manger, le déjeuner est prêt !

Silence.

– Ma chérie, viens à table !

Ma fille, si sensible, si intuitive, ne sent-elle pas poindre l’agacement dans ma voix ?

– MiniPrincesse, lève le nez de la tablette TOUT DE SUITE !

11h18

– Beurk.

– Les pâtes, c’est beurk ?

– Oui.

– Bon. Tu veux de la semoule ?

– Beurk.

Je me creuse la tête, à court de bestsellers. Au bout de 48 heures de jeûne quasi-complet – rapport à son « petit ventre, moi », je cède à la panique, prête à tout pour faire ingérer un peu de nourriture à mon enfant qui frôle sans nul doute l’inanition.

– Tu veux de la compote ?

– Non.

L’heure est grave.

– Tu es sûre ? Même pas une compote EN GOURDE (alias le graal) ?

– Non, merci, Maman.

« Non, merci, Maman » ?

Moi, au bord des larmes :

– Du chocolat ?!!

11h29

La tablette de Prince est couverte de petites traces de petits doigts chocolatés.

11h50

De ma plus douce voix de mère dévouée :

– Tu viens, MiniPrincesse, c’est l’heure de la sieste !

Regard courroucé.

– Mais Maman, moi occupée jouer !

– Si tu vas te coucher immédiatement, je te laisserai rejouer à la tablette tout à l’heure.

La discipline positive en action, je vous dis.

Parents efficaces (une aubaine pour toi, parent inefficace)

Parents efficaces (une aubaine pour toi, parent inefficace)

11h51

MiniPrincesse est au lit.

12h25 (BEAUCOUP TROP TOT, donc)

– Mamaaaaaaaaaaaaaan ! braille MiniPrincesse.

– Oui, ma chérie ? Qu’est-ce qu’il y a encore ?

Je brandis machinalement – la force de l’habitude – le thermomètre devant le visage cramoisi de MiniPrincesse, déclenchant moult hurlements.

– Moi pas malade, Maman ! PAS THERMOMETRE !!! PAS THERMOMEEEEEEETRE !!!

40,2°. Epatant.

Avant d’avoir des enfants, je croyais que c’était la panacée que de s’occuper d’un enfant patraque. « Ca » ne fait que dormir, non ?

Ben non. Un enfant malade, il s’avère que « ça » fait tout sauf dormir. Ca chouine, ça se mouche (mal), ça se plaint, ça veut jouer à la tablette, ça ne veut rien manger sauf du chocolat, ça veut Papa (« il est au travail, ma chérie. – Pourquoiiiiiiiiiiii ?! Veux Papa !!!! Pas Maman !!!! »).

Pas de bol. La journée enfant malade, c’est pour Maman.

Tentative de réintégration professionnelle (ou comment « reprendre le travail » après un bébé, quand on n’a pas de travail)

– Tu crées ZERO valeur pour la société.

Voilà ce qu’avait décrété un « ami » à propos de ma situation professionnelle – au chômage – lorsque j’ai débarqué à Londres pour y suivre Prince. Comme disent les Anglais, avec de tels amis, a-t-on encore besoin d’ennemis ?

Enfin. J’ai pris acte de sa remarque, et me suis consacrée quatre années durant à l’étude de données de salaire chez SuperConseil. O joie et épanouissement.

Aujourd’hui, j’ai beau m’occuper tant bien que mal de MiniPrincesse depuis six mois déjà, force est de constater que le regard que la société porte sur moi n’a pas changé. Et maintenant qu’ « on » (ma mère / ma belle-mère / ma meilleure amie / ma pharmacienne) a épuisé le sujet de mon accouchement (péri ou pas péri, est-ce que j’ai eu très mal ou très très mal, combien pesait MiniPrincesse au gramme près et autres questions passionnantes), « on » (ma mère / ma belle-mère / ma meilleure amie / ma pharmacienne) n’a de cesse de me demander quand je compte « reprendre le travail ».

Et chacune a son avis sur la question.

Ma mère, dont le congé maternité n’aurait duré que quelques heures, le temps de rentrer et de sortir de la clinique, plisse le nez à chaque fois qu’elle me demande quand mes « vacances » prendront fin.

Ma belle-mère, qui, à chaque enfant, s’est arrêtée trois ans pour les « élever elle-même », fronce les sourcils lorsqu’une malencontreuse remarque (« Prince, au moins, a cinq semaines de congés par an ») lui laisse penser que  je ne baigne pas dans la félicité absolue.

Ma meilleure amie, qui « comme tout le monde » en France a repris le boulot lorsque son bébé a atteint le grand âge de deux mois et demi, me lance des regards courroucés lorsque je lui explique que MiniPrincesse « est encore si jeune pour la confier à des inconnus ».

Ma pharmacienne pose la question, mais au fond, s’en fiche comme de sa première boîte de Prozac. C’est toujours ça.

Yummy mummy

Quoi qu’il en soit, je suis bien en peine de répondre. Prise en flagrant délit de désorientation professionnelle, je marmonne vaguement « sais pas », « tellement épanouissant de voir MiniPrincesse grandir » et « on verra ». Je ne peux même pas arguer d’un hypothétique congé parental puisque j’ai eu la brillante idée de démissionner juste avant de tomber enceinte. Oui, j’adore m’occuper de MiniPrincesse. Oui, sans aide de l’Etat providence français, mon salaire couvrira à peine la nounou / nursery / childminder. Mais si je continue à converser diversification et développement moteur, c’est bientôt moi qui aurai besoin de soins.

Je n’en suis d’ailleurs pas à ma première tentative de réintégration professionnelle.

Lorsque MiniPrincesse avait trois mois, j’ai manqué tomber de ma chaise en découvrant une annonce de job trop beau pour être vrai :

« Poste flexible pour Français habitant à Londres »

Il s’agissait de s’occuper à distance (vive les nouvelles technologies) du site français d’une entreprise anglaise, fondée par un couple du quartier.

C’était effectivement trop beau pour être vrai, le couple en question passant plus de temps à s’écharper et s’affubler de noms d’oiseaux qu’à cogiter sur leur développement à l’international.

L’entreprise fit faillite deux mois après que j’aie jeté l’éponge. Pure coïncidence, bien sûr.

Me voici revenue à la case départ (pour rappel : zéro création de valeur). Je suis assaillie par les pires angoisses. Jamais je ne retrouverai un emploi. Je suis condamnée à passer ma vie au foyer. Ma carrière est finie.

Une nuit d’insomnie, je n’y tiens plus, et contacte une brillante ancienne cliente de mon époque SuperConseil, . Elle ne s’étonne guère de l’heure à laquelle mon mail lui parvient (3h17 du matin) et me propose immédiatement un rendez-vous. Et pas pour parler biberons.

We are back in business !

Tentative d’intégration #2 : le playgroup alternatif

Si je suis sidérée d’apprendre que c’est à moi de confectionner une souris en feutre blanc (super utile, vous me direz) tandis que ma fille « joue librement » aves des jouets-en-matière-naturelle, je suis la seule à le laisser paraître.

Les autres mères ne mouftent pas lorsque Hippie en Chef distribue les aiguilles (je n’ai pas cousu depuis que ma mère a tenté de m’apprendre à coudre un bouton, jetant rapidement l’éponge devant mon évident manque de coopération).

Les autres mères ne protestent pas lorsque Hippie en Chef fait passer de minuscules morceaux de feutre coupés au millième de millimètre près pour correspondre exactement au « patron » (je ricane assez peu délicatement, repensant à mon soulagement lorsque j’appris que les cours d’arts plastiques s’arrêtaient à l’entrée au lycée).

Les autres mères – bon, certaines – parviennent même à sourire, apparemment ravies de cet exercice de couture impromptu (je proteste à mi-voix auprès de Hippie en Chef : « je n’ai pas cousu depuis l’âge de 14 ans et je ne comprends rien ! » – en vain).

Je suis vraisemblablement la seule mère à trouver surréaliste cette scène où une dizaine de femmes adultes cousent, tout sourire, de microscopiques souris de feutre tandis que leur marmaille tente de colorier à l’aide de simili-crayons-en-matière-naturelle (MiniPrincesse, toujours pleine de ressources, a réussi à mettre la main sur un bon vieux stylo-bille noir sorti d’on ne sait où). Tout ça pour « se montrer en état de créativité ».

Je suis si indignée par ce nouvel esclavage librement consenti qu’en bonne Française, j’entame une silencieuse grève sur ma chaise. Je vais même jusqu’à m’intéresser aux gribouillages de MiniPrincesse (« Oh, comme c’est joli ! C’est quoi ? Un bonhomme ? Ah, un soleil ! Très bien ! »).

"Maman, regarde : chien" !" (véridique)

« Maman, regarde : chien » ! » (véridique)

En bonne Anglaise, Hippie en Chef fait mine de ne rien remarquer (ou ne remarque rien). Sa seule contribution à l’animation du groupe se borne à deux interventions, prononcé d’un ton égal :
– (mummies, juste pour vous informer que j’ai égaré mon aiguille)

Avoir perdu une aiguille au milieu d’une douzaine de tout-petits marchant pieds nus ou à quatre pattes ne l’inquiète guère.

Puis, quelques minutes après :
– (surtout, ne vous dépêchez pas, nous pourrons terminer cette activité mercredi prochain) Plutôt mourir.

Pendant que les mères s’affairent à leurs souris respectives, j’observe avec satisfaction que la plupart d’entre elles prêtent si peu d’attention à leur tenue que pour une fois, je parais presque bien habillée. Les joies simples sont parfois les plus douces.

Enfin, au bout de quarante-trois longues, très longues minutes, nous rangeons enfin aiguilles (celles qui restent), patrons et faux crayons. Autour de moi, j’aperçois quelques souris qui ressemblent à des souris. La mienne traîne, négligée, en plusieurs morceaux (j’ai quand même réussi à découper le patron), sur la table. Je la fais disparaître discrètement.

Voici venu le moment préféré de MiniPrincesse : la collation. En Angleterre, si l’enfant ne s’est pas alimenté entre son porridge de 8 heures et le curry de 11h30, on craint pour sa santé. D’où l’importance du snack. Et bio ou pas, le menu du snack anglais semble immuable où que j’aille : galettes d’avoine et/ou de riz accompagnées de raisins secs. Si c’est Byzance, on y trouve aussi des pommes ou des clémentines. Bingo. Avec une petite surprise : pour mériter le snack,rien ne vaut une petite bénédiction païenne, entonnée par Hippie en Chef.
– (merci pour ce repas merci pour le soleil merci pour la terre etc)

A peine MiniPrincesse a-t-elle englouti son dernier raisin sec (et piqué ceux abandonnés par sa voisine) que je me lève pour aller m’acquitter de mes trois livres, espérant ainsi pouvoir m’échapper de cette quatrième dimension. Hippie en Chef hausse un sourcil et me dit : – (le paiement ne s’effectue qu’à la fin, le playgroup n’est pas fini)

Vu l’accueil que tu m’as réservé, je ne risque pas de le savoir, espèce de beatnik, me retiens-je de lui lancer.

J’endure donc encore un peu de freeplay, quelques chansons en l’honneur du soleil et l’incompréhension de MiniPrincesse devant le fils de Hippie en Chef qui, à peine sa mère partie de la pièce, se met à donner des coups de pieds à tout ce qui bouge (« Ne t’inquiète pas ma chérie, ce petit garçon de cinq ans doit être contrarié que sa maman ne l’ait pas encore allaité depuis le snack. Ou alors il aimerait bien porter des chaussons normaux plutôt que des babouches rose vif »).

Enfin, nous sommes libres.
– Alors, MiniPrincesse, ça t’a plu, ce playgroup ?
Ma fille, flairant le piège, ébauche une prudente grimace.
– Bizarre, dame ? hasarde-t-elle.
– Oui, je suis d’accord, ma puce, la dame était un peu bizarre.

La vérité sort de la bouche des enfants.

Véridique - c'était plein

Véridique bis : c’était plein